MARRONNIERS EN MARS

En mars 2011 j’ai observé  les services d’entretien de la ville de Pontoise occupés à tailler les marronniers. Certains arbres n’avaient plus aucune branche. On voyait de pauvres moignons pointer vers le ciel. Cela m’a bouleversée. Et je me suis mise à chercher partout de ces arbres mutilés en plein printemps alors qu’ils ont besoin de toute leur énergie pour se remettre des  rigueurs de l’hiver et juste au moment où les oiseaux cherchent à nicher.

Nous justifions notre passion pour la coupe géométrique par les dangers qu’une branche dépasse de l’alignement et potentiellement tombe. Nous gardons la maîtrise sur ces êtres vivant différemment de nous en leur donnant la forme qui nous va.

Mais faut-il donc s’obstiner à planter de grands arbres si leur forme ne nous convient pas et aller ainsi contre leur développement normal ? De toute façon, quelle ombre tronquée peuvent-ils encore offrir ?

Et si les oiseaux ne trouvaient plus où nicher ?

Voulons-nous vraiment un monde sans oiseaux ?

Notre manière de traiter notre environnement est-elle si différente de notre manière de vivre  en société ? Quand nous agissons en maîtres des lieux en traitant de manière volontariste les personnes et les situations en termes d’efficacité, de rendement, sans adaptation et sans compensations,  sans conciliations, nuances, soutiens, exceptions, les solutions globales, définitives, uniformisées, montrent vite leurs limites.

N’est-il pas temps de  manifester plus de délicatesse envers notre environnement aussi bien naturel que social et nous engager dans une perspective plus prospective ?

J’ai constitué un ensemble de photographies des marronniers de la gare de Cormeilles-en-Parisis et du Parc des Lavandières à Pontoise.  Je les ai imprimées sur papier et j’ai fait des rehauts au crayon de couleur et au pastel gras en cherchant à leur donner une présence incontournable pour qu’on ne puisse plus dire, je ne savais pas, je croyais que c’était normal.

Michèle Waquant , mai 2012